Couteaux : Etymologie de quelques substantifs de base.
Un peu de linguistique... tranchante

Pour une fois, un article avec peu d'images.
En latin, couteau se dit culter, cultellus signifiant "petit couteau" :
Notre actuel mot français couteau est l'héritier du diminutif cultellus (prononcer "coultèlous") : la voyelle finale est tombée au 7e siècle de notre ère, le U se transforma en O, ce qui donna coltel.
Puis les L qui suivaient une voyelle et précédaientt une consonne se vocalisèrent en U. Ainsi, en français moderne, on dit encore de nos jours "un bel objet" et "un beau vase" ; de la même façon, coltel devint couteu (prononcer "co-ou-té-ou" en liant les voyelles).
Je ne me souviens plus des raisons philologiques qui firent que le "éou" final est devenu un "o", mais cela me reviendrait sans doute si vous me menaciez de me priver de mes M16.
Donc, petit cultellus est devenu grand couteau :
Poignard remonte à poignal, qui remonte lui-même à un adjectif du latiin populaire *pugnalis (de pugnus «poing») «qu'on manie avec le poing», sur le modèle de manualis «qu'on tient dans la main». Le mot signifie aujourd'hui :
Arme blanche à lame courte, assez large, tranchante et effilée à son extrémité, garnie d'un manche.
Définition à comparer pour ses différences avec celle du couteau :
Instrument tranchant formé d'une lame emmanchée de forme et de longueur variables.
On voit qu'il manque ici la notion de longueur : une épée à deux mains est-elle un couteau ?
Quant au mot dague, à en croire les autorités compétentes, il n'a pas aujourd'hui dorigine certaine (peut-être celtique), mais elle se définit de la sorte :
Poignard ou épée courte en usage du Moyen Âge au XVIIIe siècle, dont la lame aiguë et plate pouvait pénétrer au défaut de la cuirasse et à travers les cottes de maille.
Selon ces définitions (d'un excellent dictionnaire de français en libre accès sur la toile), le mot couteau est donc générique, un peu comme knife en anglais, si ma mémoire est bonne.
Voilà ce que les ancêtres nous léguèrent linguistiquement avec lobjet de notre intérêt qui, selon ma terminologie personnelle, s'appelle coutel plutôt que coutal, étant bien entendu qu'il s'agit d'un choix, non d'autorité, mais de langue : si le mot ancien avait été *coutal, on aurait aujourd'hui le mot coutau, et non le mot couteau.
A tous, un bon week-end.



Merci Nicolas, pour cette touche de culture dont je suis friand...
Comme dit un proverbe Africain : "Si tu ne sais pas où tu vas regarde d'où tu viens".
l'éthymologie avait la dent dure, car le "L" est en outre, repris allègrement dans coutellerie. 
![En Haut [^]](/public_images/skins/itheme/fleche-haut-13.png)
Le L intervocalique (entre deux voyelles) reste L et le L qui suit une voyelle et précède une consonne devient U :
merki
Très bon article. C'est dans ces moments-çi que l'on se rend compte que nous connaissons mal notre histoire. Mais j'aimerais bien savoir quel est le nom du premier couteau dans l'article... Ma connaissance de tous les noms de couteaux est un peu limitée.
CRKT Hawk K-AT
Merci beaucoup pour cet article !
Merci Nicolas pour cette brillante synthèse et merci Sophie pour cette fine intervention qui chante à mon oreille et rappelle non seulement la vocation première du couteau en tant qu'outil - à visée alimentaire/nourricière - mais aussi sa relation primaire avec la culture (pas celle de la confiture même si celle-ci cultive un rapport intime et gourmand au couteau).
J'ajouterais simplement à ces posts réjouissants que "poignard" et "manuel" se disaient de la même manière en Grec, à savoir Enchiridion. Par exemple, le "Manuel" du Stoïcien Epictète se disait Enchiridion, poignard, donc ce qu'on a dans le poing. C'est ce qui est utile te qu'on a toujours sur soi pour toutes sortes de situations - donc comme la philosophie. Si par conséquent on rattache la philosophie à l'affaire, en tant que passion de la sagesse, ne pourrait-on dire qu'ici se joignent finalement non pas deux, non pas trois, mais quatre passions ?




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