Couteaux : Gembloux 2008 - Une journée sur le fil
Rencontres et coups de coeur en terre belge
- Samedi 8 novembre 2008 -
Debout bien avant l'aube pour attraper à coup sûr mon train de 6h55, je monte dans un Thalys, qui, quelques minutes après le départ, s’immobilise en pleine campagne suite à des problèmes sur la voie. Le soleil se lève sur les champs, les minutes défilent, et, impuissant, je vois déjà se profiler la vision de tables vides à mon arrivée à Gembloux (et je songe notamment à celle d'Eric Parmentier...). Ne pouvant rien y faire, j'en profite pour dormir. Je me réveille à Bruxelles sur le coup de 10h00.
Une gaufre plus tard, je suis dans le train pour Gembloux, sorte de RER de campagne, qui m’emmène en un peu moins d'une heure jusqu'à la ville du salon. Comme je l'avais relevé sur Mappy, la gare de Gembloux est assez excentrée, et en tout cas loin du foyer communal où se tient l'exposition de la BKS (Belgian Knife Society). Le pied à peine posé hors de la gare, c'est parti pour 20 minutes de marche à la boussole, heureusement sous un beau soleil.
A midi et quelques, je franchis enfin les portes de l'exposition… et je pénètre dans une minuscule salle abritant à peine une petite dizaine d'exposants, dont la plupart me sont inconnus.
Bon sang ! J'aurais fait autant de chemin pour un si petit salon ??
Que nenni ! Car le foyer communal de Gembloux est pourvu d'une architecture que je qualifierais de déroutante. En effet, en ressortant de la petite salle, puis en prenant légèrement sur la gauche et en remontant un long couloir, je touche enfin aux béatitudes : le grand salon des artisans et professionnels (à peu de chose près de la taille du SICAC).
Je scrute la salle à la recherche de LA table qui m'a fait faire tout ce chemin, celle d’Eric Parmentier. J'ai en effet une triple raison de revoir Eric et son épouse Véronique. D’une part, parce que c’est toujours un plaisir de les rencontrer. D’autre part, parce que je conserve une certaine “frustration parmentière” depuis le dernier SICAC, où, étant arrivé un peu tard le premier jour, j’avais découvert une table vidée de ses couteaux. Enfin, parce que je tiens à offrir à mon meilleur ami, pour ses quarante ans, un couteau siglé du poisson à l’épée. Je ne mets pas longtemps à trouver la table de Mr et Mme Parmentier, puisque elle est bien cernée par des connaisseurs, à quelques mètres à peine de l'entrée. Je m’approche, fébrile, et... Ouf ! Je constate qu’il reste encore quelques couteaux à la vente. Pas énormément, certes (seulement sept sur les vingt sept apportés, dont deux déjà entre les mains d’un amateur), mais il en reste. Eric et Véronique Parmentier me reconnaissent. Poignées de main, embrassades, et Eric m'invite aussitôt à découvrir ses nouvelles oeuvres : le Tyrex et le Piwi.
Ces deux nouveaux couteaux sont une grande première pour Eric, qui aborde avec eux une toute nouvelle gamme, en utilisant pour la première fois le G10 comme matériau pour les manches. Et le moins que je puisse dire c'est que Eric m'a bluffé. Si d'aucuns pouvaient encore l’imaginer cantonné dans un seul (et déjà excellent) style "Parmentier", le Tyrex et le Piwi sont les preuves réussies d'une capacité à se renouveler et à aborder tous les matériaux et toutes les tendances coutelières, tout en conservant ce qui fait un Parmentier : des lignes résolument douces qui flattent autant le regard que la main, une fonctionnalité à l'épreuve du quotidien, une finition irréprochable, et une âme certaine, de celle qui habite à jamais un couteau réalisé par un passionné.
Je prends en main le Tyrex, un pliant de forme rectiligne, muni d'une lame en niolox sablé (pied de mouton ou fer de lance), et d'un manche G10 riveté. Le Tyrex est équipé du fameux système d’ouverture et de blocage de lame à piston, innovation déjà remarquée sur le Reflex. Il s'agit en (très très) gros d'une sorte d’axis lock entièrement revisité, puisque basé sur un solide piston hydraulique (aux lieu et place des fins ressorts oméga utilisés sur l’axis des Benchmades). L'ouverture et la fermeture du Tyrex se fait au coup de poignet en tirant simultanément sur l'axe du système Reflex, le piston aidant au déploiement et au repli de la lame. C'est très plaisant, ludique, et propice à l'addiction (pour ma part, j'adore ce procédé). En outre, le système Reflex est doté d'un rattrapage de jeu, ce qui confère au blocage une tenue dans le temps incomparable.
Je manipule quelques instants un Tyrex à manche noir. Bien, très bien même. Mais, l'autre création d'Eric, le Piwi, me fait de l’œil, et je tiens à me faire une opinion sur chacune de ces deux nouvelles lames. Je repose donc le Tyrex et essaie un Piwi. Bon sang, quelle prise en main ! Elle me rappelle la sensation que j'avais éprouvé la première fois avec mon Parmentier 1220 (toutes choses égales, d’ailleurs, car les deux couteaux sont bien différents).
Une tenue en main évidente, c'était déjà (toujours ?) un bon début. J'examine donc le reste... et il est à l'avenant :
- la lame en niolox sablé et forme pied de mouton légèrement retroussé à la pointe, et pas agressive pour deux sous ;
- Sur cette même lame, solide, épaisse, et très fonctionnelle, figure un long guillochage sur le dessus pour le pouce, et un autre guillochage plus court en dessous pour l'index (malin) ;
- la juste texture du manche en G10, ni glissant, ni râpeux, qui n'agresse ni la main ni la poche ;
- la forme du manche que l'on croirait moulée sur la main, avec ce petit empennage arrière qui verrouille et stabilise la prise ;
- la maniabilité flagrante issue de cette très étudiée forme du manche et des non moins étudiés guillochages ;
- la légèreté et la finesse de l'ensemble (le Piwi est agréable en poche, mais il ne dispose pas de clip, c'est donc ce que j'appelle un couteau de fond de poche ou de fond de sac) ;
- la sécurité du système d'ouverture/fermeture à cran forcé en deux temps (le blocage traditionnelle de la lame à 180°, et un autre à 90°), ce qui évite de se blesser en se claquant la lame sur les doigts ;
- et j'en passe...
Et puis non ! Je n'en passe pas ! Car en plus, il est beau, résistant, ne craint pas l'eau, possède un profil sage et moderne. Un vrai couteau de bon père de famille, avec en prime la touche hi-tech qui fait de ce couteau un objet/outil à part. C'est sobre, évolué, avec le poids et la taille qu'il me faut, c'est superbe... bref, c'est indispensable... et... mince, ça part à une vitesse folle !
Vite, réagir !
Il reste trois Piwis. Trois couleurs de manche. Un noir, un "foliage green" (globalement le même que celui utilisé par Spyderco), et un orange bien claquant. Mon choix se porte définitivement sur le noir (pour moi), et sur son jumeau "foliage green" (pour mon ami).
NB : Pour la petite histoire,
- Les projets Tyrex et Piwi ont été conçus juste après le SICAC 2008. En à peine deux semaines, Eric avait mis au point les prototypes, et démarrait la production de sa nouvelle gamme. Très fort.
- Eric n'a proposé que cette nouvelle gamme à Gembloux, à l'exclusion de ses modèles habituels. Il tenait à bien marquer les esprits et à mettre sa nouvelle production en avant, sans comparaison possible avec ses créations classiques (et toujours d'actualité). Bref, un sacré pari.
- Le Piwi devait à l'origine s'appeler le Moustic. Mais, tout en le concevant, Eric n'arrêtait pas de le nommer Piwi ("Tiens, je retourne bosser sur le Piwi") ; du coup le nom est resté.
Je quitte le stand d'Eric, et la masse d'acheteurs qui s'y presse encore, tout en promettant à Eric et Véro de revenir les voir dès que la cohue se sera dissipée. Question de minutes, a priori...tant les achats vont bon train.
Je remonte l'allée, serein et le regard dans le vague. Mission réussie. Il n’est pas loin de 13h00, et je viens enfin d'atteindre mon objectif : au fond de ma poche reposent deux couteaux d’Eric, dans leur bel étui en cuir glacé. Je peux maintenant profiter du salon en toute quiétude. Plus rien ne presse.
Je baguenaude, je musarde, j'arrive en bout de la rangée, et là... un objet attire mon regard.
Sur une natte de paille sont disposés cinq couteaux. Celui du centre est incroyable. Une sorte d'hybride, furieux et doux à la fois. En le regardant, je songe, je ne sais trop pourquoi, au Subcom et au Lava, mais ça n'est rien de tout cela. Le dos de la lame et du manche forment un arc de cercle parfait. La lame a des allures de petit harpon, et le manche est habillé de fibre de carbone verte. Oui, verte ! Je n'en reviens pas ! C'est totalement original, étrange et beau. Il faut que je le touche.
J'aborde l'artisan, Filip de Coene, un belge flamand, d'allure taciturne, la petite quarantaine. Il a des mains mo-nu-men-ta-les, rugueuses et toutes barrées d'estafilades et autres blessures d'atelier. Il parle français, mais il préfère continuer la conversation en anglais. So, let's go !
- "May I try it ?"
- "Sure !"
La prise en main est à la hauteur de ce que je pressentais. Mon index se love contre la garde-talon de la lame, tandis que mon pouce glisse et se positionne au dos. Mon auriculaire, collé en bout de manche, finit d'assurer la prise. Nickel ! La bestiole pèse son petit poids, mais pas tant que cela finalement ; juste ce qu'il faut pour donner confiance. C'est compact, solide, et bien fini. La platine verrou est large, bien résistante et impeccablement engagé (sur la première moitié du talon de la lame). Il me faut un pouce en acier pour la désengager. J'adore ! Une chose est sûr, le lock sera la dernière chose à lâcher sur ce pliant.
Tiens ! La lame repliée fait apparaître une lentille façon “piémontais”. Je tente l'ouverture à une main. Shlack ! Ça passe du premier coup ! Je questionne l'homme de l'art, qui n'a finalement de taciturne que l'apparence. J'apprends que la lame est en acier ATS-34, les platines en 420, les plaquettes et l'intercalaire en fibre de carbone ultra-polie. Je confirme mentalement et pour moi-même : c'est original et très bien fini. Je re-questionne l'artisan. Il m'explique sa conception du couteau artisanale :
- " Quality and customer service and a product at affordable price is my goal ! "
Avec ce couteau entre les mains, je ne peux que le croire. Filip me montre d'autres couteaux de sa production, car il ne fait pas que dans le petit pliant, mais également dans le petit outil-levier (à la Atwood), et aussi dans le pliant utilitaire de taille respectable (son "Grizzly" , un flipper à lame S30V et manche en fibre de carbone, en est un bel exemple). Filip ajoute qu'il confie le traitement thermique de ces lames à un spécialiste qui travaille au degré près, ce qui est rassurant. Puis, me voyant conquis par le compact que j'ai dans les mains, Filip continue à me vanter les mérites de son couteau :
- l'émouture plate et régulière de la lame,
- la lame centrée dans le manche,
- l'absence de jeu de l'ensemble,
- l'ajustement net des pièces entre elles...
C'est du très bon boulot, et ça se voit. Pour un peu, je serais presque convaincu sur le champ. Mais... j'ai faim. Ne jamais conclure une affaire à jeun, reste une règle. Je dis à Filip que c'est superbe, mais que la faim me taraude, et que je veux voir le reste du salon avant de revenir à sa table. Il embraye paisiblement :
- "That's, OK, I don't push you ; you've got the right feeling with this knife, I see it ; so, I keep it for you."
C'est gentil de sa part, et je l’en remercie. Je ne manquerai pas de revenir le voir, car si j'ai le "right feeling" avec son couteau, l'homme m'a également fait une très bonne impression.
Je sors du bâtiment, et déniche non loin de là une excellente pizzeria (Poldo's, je retiens l'adresse pour le prochain salon). Je mange ma délicieuse pizza tout en examinant mon nouveau Parmentier. Entre deux bouchées, je "panoramique" sur la salle : la moitié des clients tient un couteau custom à la main. Damned ! L'innocente pizzeria est en fait le repère d’un jour des accrocs à l'acier affûté (j'en rigole encore). La serveuse passe et regarde mon couteau d’un air amusé ; son sourire me dit : “pas de problème, on a l’habitude...”.
Je règle la note (mince, la moitié de ce que j'aurais payé à Paris !), et je file de nouveau vers le salon.
De retour, je remonte une allée et suis attiré par une table bien colorée, celle de Kevin Wilkins. J'engage rapidement la conversation, aidé en cela par la décontraction et l'ouverture d'esprit du Monsieur. Américain d'origine, Kevin vit aujourd'hui à Berlin où il conçoit ses couteaux. L'une des spécialités de Mr Wilkins est de déshabiller des couteaux qu'il affectionne (BM Griptilian, notamment), pour les rhabiller avec des costumes en G10 et/ou aluminium anodisé, texturés à sa manière et hauts en couleurs.
Je teste un Griptilian au manche "vert swimming pool" et intercalaire en aluminium bleu. Superbe. Le BM Grip’ est magnifié. Autant, je n'apprécie pas plus que cela le modèle original, autant là je suis à deux doigts d'être conquis. L'équilibre est bon, la tenue en main est sûre et plaisante, l'ensemble manche et lame est cohérent. Si ce n'avait été ce guillochage de lame un peu agressif (mais propre au BM), je crois que ce "Griptilkins" aurait rejoint le Piwi dans ma poche.
Je jette un coup d'oeil au reste de la production tout en continuant à discuter :
- Oh, un beau Leaf Storm orange avec frame lock en titane bleu anodisé ! (NB : Spyderco en produira bientôt en série une version spécifique, le Leafstorm figurant d'ores et déjà au catalogue 2009).
- Oh, un très beau petit fixe à manche G10 translucide, doté d'une prise en main très (mais alors très) agréable !
- Oh ! Un très joli et très fonctionnel couteau de cuisine ! (NB : une nouvelle gamme lancée par Kevin).
Bon. Je prends une grande inspiration, la carte de visite de Mr Wilkins, et mon courage à deux mains pour ne pas me laisser tenter. Je regarde Kevin, lui adresse un "Nice work !" de circonstance, et je lui demande si je peux prendre des photos.
- "Ok, sure, you can !"
Je mitraille. La table est près d'une fenêtre, la lumière est bonne. Je salue Kevin, lui serre la main, et quitte sa table avant d'y laisser ma chemise. Je suis en tout cas bien persuadé que lui et moi nous reverrons un de ces jours pour affaires...
Je reprends mon chemin entre les allées. Au détour d'une table, un artisan attablé devant des tantos, regarde ma montre et m'apostrophe :
- Wahou ! C'est quelle modèle ? Désolé, mais c'est une autre de mes passions !
- Bien, dans ce cas, je vois que nous en partageons au moins deux.
Le contact est établi. Je tends ma montre pour examen, et je commence à inspecter la table qui me fait face, et qui me plaît beaucoup. Rémy B. (puisque c'est son nom d'artiste) me rend ma montre, et nous nous mettons à parler couteau. J'apprends qu'il est passionné par l'Asie, qu'il pratique les arts martiaux, et qu'il est fasciné par les lames japonaises depuis qu'il est tout petit. Je creuse la question plus avant. Rémy (qui tente, comme il me le dit, de se faire un prénom dans la coutellerie) réalise depuis l'âge de quinze ans des tantos de toute beauté au tranchant très efficace, autant que je peux en juger. Ses spécialités : la trempe, le polissage, et l'habillage des manches, avec de la vraie peau de raie et un laçage rigoureux, dans les règles de l'art. Des artistes japonais ont même estimé son travail de laçage comme "presque parfait", ce qui équivaut à une référence.
Pour ma part, si je raffole de ces petites lames nippones et de l’esprit qu’elles véhiculent, je suis en revanche plus sceptique pour un usage sur le terrain, compte tenu de l’absence de garde. Je saisis un tanto pour voir. Le laçage stabilisé de Rémy offre une tenue en main très au-delà de ce à quoi je m'attendais. La main semble rivée au manche. Je caresse la lame du bout du doigt. Du pur satin. Rémy polit ses lames jusqu'au grain 2500 ; étonnant de beauté ! Le tranchant est acéré. La peau de raie sous le laçage noir offre un rendu splendide.
Je repère également des kiridashis (bruts de forge, pas encore terminés). J'interroge Rémy, car je n'ai jamais vraiment saisi l'intérêt du kiridashis. Rémy m'en loge un dans la main et m'explique :
- “Le but recherché avec ce type de lame, est d'avoir un tranchant court mais puissant, vu que le ratio manche/lame est de 90/10. Si le kiridashi est bien fait, l'angle de la lame permet de couper sans avoir à faire d'efforts avec le poignet.”
Je teste. Un éclair... ça y est, je viens de comprendre ! Et, c'est génial !
- "Franchement, quand on en a un, on ne peut plus s'en passer !" me glisse Rémy.
J'en suis de plus en plus persuadé.
Respiration. Voyage par delà l'imagination. Nouvelle respiration. Je quitte le Japon de l'ère Edo pour revenir au salon, les pieds sur terre.
Je demande à voir les étuis qui accompagnent les fameux tantos (tout en remarquant que certains sont réalisés sur une base d'acier damas magnifique). Les étuis sont en cuir fauve assez quelconques. Rémy le reconnaît, mais n'en a cure, car il s'agit d'un premier essai pour lui. “Je me perfectionnerai avec le temps”, me dit-il ; ce dont je suis certain. Question : fait-il des étuis en kydex ou en concealex sur commande ?
- "Un peu que j'en fais ! Et le Kydex, je maîtrise pas mal !".
Gonflé, mais ça me plaît. Je veux voir. Ah oui, le fait est ! Bel étui en kydex, avec bon maintien, et absence notable de mouvement de la lame à l'intérieur. Muni de plusieurs trous pour un Tec-Lock, et des minis trous d'aération nécessaires, cet étui est bien fabriqué, et sent le pratique. Rémy commence à me plaire (dans le bon sens de l'acception). D'autant que je constate que Rémy ne fait pas que dans le tanto et le kiridashi ; ses fixes utilitaires, bien costauds, arborent un belle finition patinée, et ne demandent visiblement qu'à oeuvrer sur le terrain.
Je dis à Rémy que nous allons forcément nous revoir, pas dans l'immédiat car le temps m'est compté, mais ça viendra. Nécessairement. Surtout avec une production qui transpire le talent et la passion. Comme aurait dit James Bond : "I have an unfinished business with this man !"
Je m'échappe de la table de Rémy avant de commencer à craquer pour de bon. Je me retourne, et ne quitte pas le Japon, puisque je tombe sur la table de Hiroshi Hanada, le patron de Rockstead. Il me montre son nouveau couteau : le Higo, le premier frame lock de sa marque.
Mr Hanada me démontre comme toujours l'incroyable résistance de la lame (test du bambou et de la feuille à l'appui). Mais, cette fois, Mr Hanada va plus loin. En deux coups de tournevis, il démonte le Higo, et le remonte de même. Sans la moindre difficulté. Avec beaucoup de gentillesse, Mr Hanada accepte de refaire la démonstration sous l'objectif de mon appareil photo.
Wahou ! Pour moi, l'un des seuls, si ce n'est le seul frame lock au monde capable d'un tel démontage/remontage éclair était jusqu'à présent le Chris Reeve Sebenza. Je le fais remarquer à Mr Hanada, qui me dit qu'il est très fier de sa réussite : il fait maintenant jeu égal avec Mr Reeve sur ce point. Je salue Mr Hanada, et le remercie le remercie pour le temps qu'il m'a consacré.
Le temps...
Je sursaute. Il est déjà 16H00, et mon train part à 16h34, il s'agit de foncer. Et je fonce, jusqu'à la table d'Eric et Véronique. Re-embrassades et poignées de main. Eric a vendu tous ces couteaux, sa nouvelle gamme a très bien marché. Pour l'anecdote, peu après mon passage, il n'en restait plus qu'un, et une dame, qui venait à regarder la table d'Eric, s'est exclamée : "Ben... il n'en a fait qu'un cette année ?!". Eclats de rire. Je suis très content pour Eric et son épouse. Ils avaient une petite appréhension pour cette nouvelle production. Finalement, tout s'est très bien passé, et ce n’est que mérité. Je partage leur bonheur, et leur souhaite bonne continuation.
Avant de partir, je tiens à revoir Filip de Coene. J'arrive à sa table. Il a gardé le petit compact qui m’avait fortement intéressé. Filip me fait comprendre qu'il aurait pu le vendre cinq fois et plus depuis mon dernier passage. Ça, je veux bien le croire, tant la bête est alléchante, mais je ne m'arrête pas à cette réplique ; je tiens à saisir de nouveau l'engin.
Mince ! Même bonne impression que tout à l'heure, si ce n'est plus. Je dois prendre une décision. Et, il me reste moins de vingt minutes pour rejoindre la gare.
J'ai chaud.
Une pièce unique et bien finie... que je n'arrive plus à reposer sur la table tant elle épouse ma main... Ah, et puis zut ! Je dépasse la réflexion et me laisse aller pleinement à l'émotion coutelière :
- "OK, I take it !"
La transaction s'effectue, je prends le couteau et je serre la main de Filip, qui me lance un amical :
- "Truly, you can't regret this knife !".
Oui. Je n'en doute pas un instant. Au fond de moi, je sais bien que j'ai fait le bon choix. Mais je n'ai plus le temps de penser. Je prends une dernière photo de la production de Filip ; je le salue et je m'apprête à partir... quand un géant hollandais me tape dans le dos, et me tend une invitation pour participer au salon de la DKE (Dutch Knife Exhibition), tout en commençant à me parler de sa propre production...
Merci, merci, c'est très sympa à vous, mais... J'AI UN TRAIN A PRENDRE !!!!
Il me reste une dizaine de minutes. Je fuse dans l'allée qui mène à la sortie. Puis, c'est la course dans le village jusqu'à la gare.
Je déboule sur le quai juste à temps pour prendre le train. J'y grimpe, et m'affale sur mon siège. La journée a été terriblement rythmée. Mais quelle joie ! Je regarde mes acquisitions. Sûr que je ne regrette pas le compact de Filip (NB : j'apprendrai plus tard qu'il se nomme "Mini"). J'en aurais été vert (carbone) de le laisser là-bas celui-là! Et mon Piwi ! Quelle belle prise dirait mon grand-père ! C'est Noël avant l'heure !
Je range les deux lames dans ma poche, m'enfonce dans mon siège, et me couvre de mon manteau. Deux secondes plus tard, je dors déjà.
***
NB : Un grand merci à Rémy B. et à Filip de Coene pour les photos qu'ils m'ont permis d'utiliser ici.
Mots-clés : salons de couteaux
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