Couteaux et retrouvailles
Un autre excellent article de Pearce !
Un Victorinox Excelsior (deux lames à cran forcé)
Petit, fin et arrondi, ce couteau suisse à cran forcé fut longtemps l’un de mes préférés, car il savait se faire oublier en poche et proposait tout ce dont j’avais besoin : une petite lame pour découper précisément des feuilles de papier, et une lame de taille moyenne pour peler une pomme ou une orange.
Je me souviens encore de la tête et de la réflexion du coutelier qui me le vendit (j’avais alors dix sept ans) : « Comment, j’aurais un couteau suisse à 32 francs dans ma vitrine ? Ah, là, vous m’étonnez fort, jeune homme… ». Et pourtant, c’était bien le cas. Le couteau traînait sur une étagère, presque oublié, car d’allure tellement insignifiante à côté des gros modèles multifonctions de la marque suisse.
Bien des années plus tard, le logo Victorinox s’est en partie effacé (il était gravé dans le plastique et finement argenté à l’époque), mais les lames et leur mécanisme sont quant à eux en parfait état. Une goutte de Blue Lube, un passage sur l’affûteur, et, depuis, l’Excelsior ne quitte plus ma poche.
Un EKA Swede-38 (cran forcé, manche en bois et lame Sandvik 12c27 phosphoré)
Offert par mon père, qu’il l’avait reçu en cadeau d’aciéristes suédois, j’avais été surpris par le pouvoir de coupe de cette lame qui se distinguait tant de mes Opinel , Laguiole et autres multi-lames suisses. La finition noire/bleutée de l’acier, façon canon de fusil, sortait également de mon ordinaire.
J’ai éprouvé un grand plaisir à ressentir à nouveau dans ma main ce couteau simple et bien conçu. Le cran forcé est toujours aussi impressionnant à la fois de fermeté et de tenue à l’ouverture, et de douceur et de retenue à la fermeture (rien à voir avec le couperet claquant de mon Laguiole ). Au (re)sortir de la boîte, la lame n’a même pas eu besoin d’un aiguisage (à noter qu’EKA fournissait la pierre à huile avec le couteau ; je ne sais pas si cette pratique perdure). J’ai juste resserré, à l’aide d’une pièce de monnaie, les deux grosses vis pour chasser le peu de jeu constaté sur l’outil ; et c’était reparti !
Le Swede-38 m’a accompagné lors de mes dernières randonnées, et ce couteau d’un autre âge, qui n’a rien à voir avec les actuelles productions super sophistiquées, s’est montré très plaisant à l’usage. L’ergonomie remarquable du manche y est pour beaucoup, la qualité de la lame aussi, et puis… il y a ce petit plus qui se dégage de l’EKA : un charme savoureux tenant à la beauté naturelle de l’objet et à son efficace simplicité.
Mon tout premier couteau
S’il en était un qui me manquait, c’était bien celui-ci. Exempt de toute marque distinctive, ultra plat, entièrement en métal, à cran forcé et lame carbone bien noircie par le temps, je l’avais reçu à l’âge de neuf ans des mains de mon père, qui le tenait lui-même de mon grand-père.
C’est dire s’il s’agissait (et s’agit toujours) d’un trésor, et si sa perte m’avait chagriné. Le retrouver fut une immense joie. Un flot de souvenirs m’a alors submergé ; notamment celui de la fierté ressentie, le jour où, pour la première fois, je possédais enfin cet instrument qui me donnait l'impression de faire mes premiers pas dans le « monde des grands ».
Lorsque je regarde ce premier couteau et mon tout récent Spyderco Military, je mesure d’une certaine manière le chemin parcouru.
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