Le modèle 0220 est une fabrication 2016 de Zero Tolerance, il s’agit de la première custom collaboration avec le designer Jens Anso.

 

Qualitativement le couteau se présente comme une sorte de midtech industriel, qui s’est imposé au sein de la gamme ZT en 2015. On peut y voir la volonté de conserver un différentiel qualitatif à l’égard de la firme chinoise Kizer mais aussi de Reate Knives qui sont toutes deux capables de fabriquer des framelocks de très haute qualité, mais avec une différence de prix qui demeure faible sur le marché américain.
On peut donc penser, raisonnablement que l’American Built est même « overbuilt » d’après les inscriptions figurant sur la boîte.
Bien que le couteau soit le n+1 flipper disponible sur la marché, il est possible de dire qu’il s’agit d’un très beau design.
 

 

Le couteau mesure 12,50 cm fermé, pour une longueur totale de 21,50 cm lame déployée. La masse du couteau est de 175 grammes ce qui me paraît plutôt lourd pour un EDC, avec une nouvelle fois une tendance à la lourdeur de ZT, pas forcément très heureuse après l’allègement global des couteaux présentés en 2015.

Mécaniquement, il s’agit d’un framelock du type Reeve Integral Lock modifié. La platine verrou possède une seule découpe externe destinée à assurer l’élasticité nécessaire du verrou. Cette découpe unique est assez large, et la zone susceptible de subir une contrainte mécanique capable de créer une crique dans l’alliage de titane a été découpée selon une forme cylindro-ogivale, avec un usinage très propre. Cette platine fonctionne à merveille et le blocage de la lame en position ouverte est immédiat et sans aucun jeu fonctionnel résiduel latéral ou vertical. Il est évident que le couteau a été construit pour être très solide.
L’alliage de titane utilisé pour la fabrication des côtes est du Ti6 Al4 V classique en coutellerie industrielle ou custom, c’est un titane dit de grade 5, utilisé dans l’industrie aéronautique. 
 

 

On remarque que le verrou en titane a été usiné en creux pour recevoir un liner anti-usure en acier trempé. Ce liner est très bien ajusté et s’engage sans souffrance au talon de la lame, il est fixé au moyen d’une vis torx de fort diamètre.
Dans sa partie supérieure, le liner possède une excroissance rectangulaire qui vient prendre appui dans un logement usiné dans la partie supérieure de la côte de droite et sert à éviter tout retrait du verrou dont le débattement excessif serait de nature à l'endommager.
Ce dispositif est relativement simple, il est sûr et sur l’échantillon de couteaux que je possède avec ce type de mécanisme je n’ai jamais noté de faiblesse. Il est toutefois possible d’y voir un perfectionnement inutile qui est de nature à fragiliser le couteau, alors qu’un bout de verrou en titane trempé apporte une très bonne solution mécanique sans accroître la complexité du couteau.
 

 

Les côtes en titane possèdent une épaisseur similaire de 4 mm environ, ce qui explique le poids de la bête, d’autant plus que l’on n’a pas trouvé opportun d’usiner des évidements dans les côtes. Certes, l’argumentaire commercial est de dire que c’est un « tank » mais dans la pratique cela reste un couteau lourd !!!
Le manche possède une épaisseur de 14 mm, ce qui est plus que confortable pour y poser le pouce, même sans aucun crantage, car la surface d’appui permet d’exercer une grande force et d’acquérir un parfait contrôle directionnel des travaux de coupe.
 

La hauteur du manche est de 26 mm à l’aplomb du verrou, tandis que la partie la plus galbé du manche vers l’arrière possède une hauteur de 30 mm : c’est d’ailleurs cette courbure arrière du manche qui confère un confort considérable lors de la prise en main du couteau. Le manche du couteau rempli bien la main et il est aisé de verrouiller une excellente prise. L’ergonomie a été supérieurement pensée.
Le manche est pourvu d’une entretoise en alunimium anodisé orange, ce qui apporte un peu de gaité dans un couteau ou la couleur grise domine. La forme du passant pour dragonne usiné dans l’entretoise est un clin d’œil évident au montage de ce type utilisé par Jesper Voxnaes (on peut par exemple comparer avec le Kyomi fabriqué par Viper).
 

 

La côte de gauche comprend un médaillon bleu avec les initiales de la marque : personnellement je trouve cette signature assez sympathique.
Le manche est assemblé dans sa partie antérieure, au niveau de l’entretoise par deux vis torx de diamètre faible qui traverse les deux côtes.
Le couteau possède un axe de pivot qui paraît massif, même si l’empreinte de clef torx située au centre correspond seulement à une clef de 6. Le stop pin est d’une taille très raisonnable, il vient s’encastrer dans un creux usiné dans le talon de la lame, le calage mécanique est donc de ce fait optimal.
 

 

Les côtes en titane reçoivent une finition grise Beadblasted de très bon niveau qui empêche les côtes de briller et cette finition est en harmonie avec la finition stonewash ultra homogène de la lame. Si l’on rajoute à cet ensemble la touche de fantaisie de l’entretoise orange, on retrouve tout le talent et la malice de Jens Anso. On peut seulement regretter l’absence de toxification du titane, bien sûr, mais cela reste tout de même une réalisation de grande qualité.
 

 

 

 

Le clip est un emprunt à Rick Hinderer, mais sur mon modèle, ce clip noir est déjà raillé d’origine, comme la plupart des clips Emerson, mais surtout il est d’une dureté rédhibitoire, une sorte de barre à mine impossible à utiliser quelle que soit la robustesse de votre pantalon. C’est un détail intolérable sur un couteau d’un tel prix et c’est indigne de la réputation de ZT. Ayant d’autres clips de cette forme dans ma réserve, je l’ai donc immédiatement démonté et remplacé par un modèle totalement identique.
 

 

Le système de déploiement de la lame est le dispositif désormais archi-connu KVT qui est un système utilisant des roulements à bille insérés dans des disques circulaires en polymère. Ce système est maintenant à son apogée en terme de fonctionnement, le déploiement par flipper sur mon modèle 0220 est aussi puissant que s’il était provoqué par un système d’assistance à l’ouverture utilisant une barre de torsion, voire un mécanisme automatique.
 

Cette puissance d’éjection de la lame est d’ailleurs susceptible d’entraîner de la part d’un public de néophyte une caractérisation mécanique pénalisante du couteau.

Sur le plan mécanique, ce couteau dispose d’une puissante rétention de la lame avec une détente d’une incroyable force. Un bon conseil lorsque vous exercer l’appui avec votre index sur le flipper, prenez garde à positionner vos autres doigts sur le clip : cela empêchera une compression du frame qui donne l’impression d’une force impossible à surmonter.
 

 

Le crantage du flipper est légèrement agressif et risque de laisser une trace temporaire sur la pulpe de votre index. Il est toutefois indispensable pour une éjection franche et plus facile de la lame.
Une fois la lame déployée, le flipper vient compléter le découpage avant des côtes qui forme un quillon inférieur très protecteur pour l’index.
 

La lame est une géométrie Drop Point pure ultra polyvalente et dépourvue de toute agressivité. On peut considérer que cette lame est superbe par la pureté et la simplicité des formes. C’est une lame très puissante qui possède une épaisseur de 4 mm. La lame est longue de 90 mm avec un tranchant lisse utile de 89 mm : ratio d’optimisation quasiment impossible à dépasser. La lame est réalisée en acier Crucible CPM-S35VN dont je rappelle les spécifications  afin de rendre ce texte autoporteur.
 

 

Le CPM-S35VN a été développé en 2009 par Crucible en collaboration avec Chris Reeve tout comme son prédécesseur le CMP-S30V. Les données techniques publiées montrent que le S35VN possède la composition suivante : 1,40% de carbone, 14% de chrome, 3% de vanadium, 0,5% de niobium et 2% de molybdène. Cet acier possède donc des carbures de vanadium, de niobium et de chrome. L'adjonction de niobium permet selon Crucible d'obtenir une résistance accrue de 15 à 20% par rapport au S30V concernant les chocs (sollicitations mécaniques transverses). En revanche, les capacités de coupe des deux aciers données par l'indice CATRA sont identiques avec un indice de 145 (la base 100 est donnée par le 440 C, le test est une opération mécanique de coupe de cartons enduits de silice, dans ce test scientifique le 154 CM obtient seulement un indice de 125!!). Selon Crucible pour des applications de coutellerie, le traitement thermique recommandé doit procurer une dureté comprise entre 58-61 HRC, en règle générale le S35VN est utilisé en 2015-2016 avec une dureté comprise entre 58 et 60 RKC, y compris pour les fermants de Chris Reeve.
 

 

La lame possède une émouture plane intégrale remarquablement réalisée et le tranchant est terriblement coupant sur mon exemplaire. Le dos de la lame est plat, avec une gestion parfaite de l’épaisseur de l’acier, le lame n’apparait jamais comme fragile même vers sa pointe. Ce couteau massif permet d’accomplir des tâches de coupe très fines.
 

 

Avec le modèle 0220 Zero Tolerance/Kershaw/KAI nous met à disposition au sein de sa gamme un très beau couteau, très solide et d’une efficacité difficile à surpasser.

Les deux bémols à rappeler concerne la masse, un peu trop lourde, de mon point de vue et le clip ridiculement dur. On est en droit d’attendre que la question du clip soit rapidement corrigée par une marque aussi prestigieuse que Zero Tolerance, dont la qualité générale des couteaux récents ne souffre que fort peu de critique.

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