Couteau Spyderco Starmate Robert Terzuola
The original
Je dois avouer que jai été très surpris de trouver un tel couteau neuf en France, fabriqué en 1999, alors quil est toujours considéré par les amateurs américains comme une icône de la firme de Golden, appartenant à lâge dor de Spyderco et très convoité sur le marché des Etats-Unis où il se vend facilement pour 300 $.
Jai déjà eu loccasion de commenter la nouvelle version du Starmate, qui malheureusement est elle aussi interrompue à ce jour Je me suis replongé dans les données chimiques et métallurgiques du CPM-440V et je pense pouvoir donner les raisons qui ont conduit à labandon de ce CPM de très haute technologie.
Le couteau mesure 12,50 cm fermé pour une longueur totale de 22 cm, ce qui en fait plutôt un grand fermant tactique. Sa masse est de 120,49 grammes est très raisonnable.
Le premier Starmate était fabriqué à Golden, alors que la dernière version était fabriquée au Japon. Techniquement cest un Liner Lock amélioré par Robert Terzuola, cest-à-dire avec un liner possédant une géométrie convexe, qui vient semboiter en douceur dans un aménagement concave du talon de la lame : ce système permet réellement un calage mécanique optimal du couteau en position ouverte. Lors de louverture, le couteau se verrouille immédiatement avec un claquement sec qui évoque un peu certains framelocks dotés de platines verrous surpuissantes. Sur le plan de larchitecture mécanique, Sal Glesser avait fait le choix, qui fut contesté lors de la sortie du couteau en septembre 1999 dune seule platine située, bien évidemment du côté du verrou. Dans la pratique, il sest avéré que ce choix était tout à fait pertinent. Toutefois, pour faire plaisir à une clientèle de passionnés la version ultime du Starmate dotée dune lame en acier VG-10 reçue deux platines ajourées.
Le liner lock possède une épaisseur qui est comprise entre 1,5 et 2 mm : il assure un formidable calage de la lame avec une régularité de métronome, sans aucun jeu résiduel affectant la lame.
Les côtes sont en G-10 noir possédant une surface légèrement abrasive, idéale pour un fermant tactique. La découpe des côtes est très propre et montre que laspect qualitatif a toujours été un élément fondamental pour Spyderco.
Si cette qualité de 1999 est réellement excellente, on peut considérer quelle est reléguée au second plan par les couteaux fabriqués en 2016 à Taiwan, et que par conséquent contrairement à ladage qui veut que « cétait mieux avant », les couteaux modernes sont encore supérieurs en finition.
Les côtes en G-10 possèdent une épaisseur de 3 mm, la côte qui reçoit la platine du côté gauche a été évidée pour que cette intégration soit la plus discrète possible et entraîne le moins de masse. La platine correspond à une longueur de 80% de la côte en G-10. La côte en G-10 de droite ne subit aucun allégement structurel, la rigidité est donc tout à fait excellente. Elle comporte une découpe assez importante destinée à faciliter laccès au verrou pour le désengager. De prime abord cette découpe paraît excessive, mais les divers essais de prise en main du Starmate ne permettent pas de mettre en évidence un risque de retrait involontaire du Liner. Le médaillon métallique circulaire Spyderco/Terzuaola avec la tête de dragon possède un charme fou et on peut regretter son abandon : nostalgie quand tu nous tiens !!!
La prise en main est excellente malgré la forme assez rectiligne du manche typique des designs des années 1980 et 1990, on pense notamment au CQC-7 dErnest Emerson et au Sebenza 21 de Chris Reeve. Mais la longueur du manche permet une prise en main très puissante. Le dos possède une cambrure légère mais très appréciable. Larchitecture du manche est renforcée par une entretoise en G-10 ou est concentrée toute la visserie du manche, au demeurant très solide. Le manche possède une épaisseur de 10 mm pour une hauteur maximale de 27 mm au centre du manche.
Les côtes ont été conçues et usinées vers la lame pour constituer un quillon inférieur qui entraîne un dégagement de lindex vers le bas, ce qui est une solution très sage compte tenu de la lame terriblement coupante
Le couteau reçoit un clip noir qui est une variante légèrement courbe du clip Spyderco en forme de cuillère. Disons que sil est noir et discret, ce nest pas le top sur le plan esthétique, dautant que mon clip raide de neuf est plutôt très dur et a failli esquinter un Jean de marque Mono-platine oblige le clip est à une seule position, ce qui sera corriger sur la seconde version.
La lame est une superbe géométrie Drop point, à la ligne très tendue, accentuée par un faux contre-tranchant. Son épaisseur est de 4 mm très bien gérée la lame napparait jamais comme fragile. Une rampe crantée a été usinée à larrière du Round Hole et permet un très bon appui du pouce. Le Spyderhole possède un diamètre de lordre de 10 mm et permet une ouverture ultra fluide de la lame.
La lame possède une longueur de 10 cm ricasso compris, et le tranchant lisse possède une longueur coupante utile de 90 mm. Lémouture est réalisée en creux et donne naissance à un tranchant très coupant mais aussi très râpeux qui pose la question de la nature de lacier utilisé le CPM-440V. A ce sujet jai donc compulsé toute la documentation technique disponible et consulté aussi le forum Spyderco, avec un post de Sal Glesser en personne datant de 2000, car la nature de lacier choisi commençait déjà à susciter beaucoup dinterrogation en ce qui concernait lentretien de la lame.
Lacier CPM-440V est historiquement le premier acier CPM (métallurgie des poudres) inoxydable produit par Crucible, le premier CPM étant le CPM-1V un acier outil au carbone.
Il semble que pour la première formule chimique dun acier CPM inoxydable, Crucible ait voulu réalisé un coup de force technologique en fabricant un acier dont la résistance à lusure serait très supérieur aux aciers conventionnels servant de référentiel technologique en 1999 comme lacier outil D2 (excellent) et le 440C qui est toujours considéré comme la base 100 (en dautre termes la référence) pour la résistance à la corrosion.
La formule chimique du CPM-440V rebaptisé CPM-S60V par Crucible est connu avec précision grâce au Fact Sheet publié par laciériste et lon comprend donc aisément comment le 440V est devenu un cauchemar métallurgique.
Dune manière globale on peut dire que les pourcentages daddition retenus étaient tous excessifs. Le CPM-440V possède une composition qui est la suivante : C : 2,15% ; chrome : 17,00% ; vanadium 5,5% et molybdène : 0,40%.
La présence dun taux très élevé de carbone et dun pourcentage très important de vanadium en fait un acier extrêmement coupant, grâce à la présence dune grande quantité de carbure de vanadium aussi coupant que durs mais présentant une distribution très homogène, sans compter les 17% de chrome qui tendent à fragiliser lacier.
Disons que si le CPM-440V est un acier dont la résistance à lusure est absolument phénoménale pour lépoque, résistance qui ne sera dépassée quavec le très cher et très contestable CPM-S90V. Lacier CPM-440V est un acier martensitique dont les qualités de résistance à lusure et de résilience sont maximales selon les données métallurgiques disponibles pour une dureté relativement faible de 56/58 HRC, avec une décroissance déjà marquée pour 58 HRC. Sans compter que la résilience de cet acier est tout à fait moyenne et quelle est identique à celle dun 440C traité pour une dureté de 58 HRC : la notion de résilience doit toujours être dissociée de la question de la dureté de lacier considéré, il sagit de la capacité dune lame à absorber lénergie dun choc transverse (énergie exprimée en joule), bien que la configuration expérimentale ne soit pas décrite Crucible a publié pour le CPM-S60V des résultats comparées entre cet acier et les aciers D2 et 440C.
Finalement, la problématique métallurgique posée par le CPM-440V ne fut pas résolue, et cette nuance est tombée en désuétude, même si elle est encore sporadiquement utilisée par une firme comme Quatermaster. Le résultat de cet essai sera la mise au point du CPM-S30V en collaboration avec Chris Reeve pour obtenir un acier de qualité réellement utilisable en coutellerie custom et industrielle.
Tout ce qui vient dêtre dit sur le CPM-440V ne doit pas faire oublier quil fut un progrès technologique majeur en matière dacier et que le seul mode de progrès possible demeure une démarche de type expérimentale avec des aciers qui seront parfois excessivement difficile à entretenir (actuellement CPM-S90V et CPM-S110V pour Crucible). Le Starmate est donc, à plusieurs titres, un collector dun formidable intérêt si vous êtes dans un démarche de collectionneur, sans compter que des versions améliorées sont toujours possibles dans la gamme Spyderco, avec notamment en 2016 la réapparition dun prototype de fermant ATR (At the Ready : le premier couteau tactique conçu par Sal Glesser) qui fera à nouveau un très bon couteau de série.
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Mots-clés : Couteaux Spyderco
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