Couteaux Ernest Emerson et le CQC-7
Histoire, spécifications et éléments de comparaison
Les deux pliants de facture industrielle à l'origine du succès d'Ernest Emerson sont le CQC-6 Raven (Ex-Viper 6) et le CQC-7, qui ont été crées en 1990/1991. L'acronyme CQC correspond à Close Quarter Combat qui est une variante du close combat, autrement dit du combat rapproché. En la matière, on peut indiquer qu'Emerson, à l'instar de Fred Perrin, possède de solides compétences dans le secteur des arts martiaux philippins, Kali et Escrima, complétées par du Jiu-jitsu. Les informations disponibles permettent de préciser qu'Ernest Emerson a développé un système de défense original, l'Emerson Defense System, enseigné aux Navy SEALS, aux SWAT Teams et aux High Risk Entry Team du FBI.
Je considère que l'appellation CQC est une approche marketing importante sur le marché américain et auprès de certains utilisateurs professionnels. En revanche, la mention "Combat" introduit le fantasme néfaste du "pliant de combat". Je préfère voir la gamme des couteaux Emerson comme un remarquable ensemble d'outils coupants à usage professionnel, donc entrant dans le domaine du "tactical gear" et rien d'autre.
Ernest Emerson est diplômé en histoire du monde de l'Université du Wisconsin, mais a surtout acquis une formation technologique et a exercé les fonctions de "prototype machinist" pendant 15 ans chez Hugues Aircraft. Les forums anglo-saxons attribuent à Ernest Emerson la qualité de "design engineer". Il est évident qu'Ernest Emerson est un technicien de première force. Par conséquent il convient de lui accorder un crédit particulier, aussi bien dans la définition d'une gamme de couteaux tactiques de qualité que dans la maîtrise des matériaux et des processus industriels de fabrication. Initialement, son incursion dans le secteur de la coutellerie industrielle se fait via deux "customs collaboration". La première avec Timberline pour la fabrication d'un couteau fixe trés réussi mais onéreux, le Specwar (émouture chisel et pointe tanto modifiée). La seconde est conclue avec Benchmade en 1994 et porte sur le CQC-7, qui devient disponible à partir de 1995 sous la référence BM 970. La vis à tête plate du pivot et les autres vis Phillips sont renplacées chez Benchmade par une visserie Torx. Par la suite, des désaccords seraient intervenus entre Lester de Asis et Ernest Emerson, sans que les raisons précises soient clairement expliquées. Il est possible qu'Emerson ait souhaité conserver le monopole du CQC-7 pour son compte personnel, dans la mesure où Emerson Knives Inc est créé à compter de janvier 1996 à Torrance en Californie. Le credo d'Emerson Knives est "hard use knives in the world".
Pour beaucoup de commentateurs, il existe un césure entre la période avant l'apparition du CQC-7 et la période suivante. C'est partiellement vrai, dans la mesure où Emerson et Benchmade fixe un cahier des charges qui sera beaucoup repris depuis lors : lame en inox de qualité (initialement l'ATS-34), des platines en titane avec des plaquettes en G-10 fournissant un excellent grip, parfois un peu abrasif. On aperçoit aussi l'entretoise en G-10 que l'on retrouve de manière systématique sur les couteaux Emerson.
Après la rupture avec Benchmade, le CQC-7 va rapidement posséder une lame en acier 154CM qui est l'équivalent américain de l'ATS-34 japonais. Cette nuance d'acier a surtout été utilisée par Bob Loveless après l'échec des travaux de Boeing pour la fabrication de certaines pièce du réacteur du 747 (tuyère). La visserie à tête plate de l'axe de pivot réapparait ainsi que la visserie Phillips, seul le clip fait l'objet d'une visserie Torx. Ces différents éléments sont sur les photographies incluses ci dessus.
Le CQC-7 est disponible en deux versions, la version A correspond à un couteau disposant d'une lame spearpoint et la version B à un couteau doté d'une lame tanto surbaissée, avec une émouture chisel redoutable. Les lames sont disponibles en version avec tranchant lisse (BT) et tranchant avec serrations (BTS) avec ou sans le dispositif Wave.
Le CQC-7 ordinaire mesure 20,22 cm, ce qui en fait un pliant de dimension moyenne dans la gamme Emerson. Il s'agit d'un couteau raisonnablement compact, avec une lame dont la dureté est comprise entre 57 et 59 sur l'échelle de Rockwell. Chez Emerson les lames possèdent une épaisseur standard de 3,14 mm et ne s'affinent que trés légèrement vers la pointe. Si la platine verrou est bien en titane, la seconde platine possède une trés faible signature magnétique qui indique une matière aussi amagnétique. Le CQC-7 est disponible en version mini et en version "super". Le super CQC-7 conserve le design original avec une augmentation du volume qui le fait passer à 22,5 cm environ.
Je n'ai jamais été en mesure d'en acquérir un exemplaire, le marché américain semble absorber la quasi-totalité de la production. Par ailleurs, si les capacités de production d'Emerson Knives ont constamment été augmentées depuis 1997, le succès est tel que les modèles sont fréquemment en rupture de stock. Donc, si vous êtes intéressés par un Emerson, et si celui-ci est disponible, portez vous acquéreur immédiatement.
J'ai possédé depuis 1995 trois exemplaires de CQC-7, dont l'un fabriqué par Benchmade. Ce premier exemplaire a été utilisé comme utilitaire à tout faire dans un environnement tropical saturé d'humidité et avec la présence d'un sable corallien abrasif. Il s'est acquitté avec brio des tâches de coupe assignées (cartons et cordes en nylon), mais le revêtement de protection de la lame a rapidement rendu l'âme. Je m'en suis séparé pour une somme modique en 1999. J'ai fait l'acquisition de mon premier CQC-7 de chez Emerson, et je dois reconnaître que le niveau de fabrication avait encore progressé de manière significative. Concernant la lame, le pouvoir de coupe est réellement exceptionnel, l'émouture chisel réalisé par Emerson Knives est plus haute que celle du modèle industriel initial, mais son entretien est en contrepartie plus difficile, l'aiguisage et l'affilage sont à mon avis à faire exécuter par un spécialiste.
Ce qui n'a pas été rédhibitoire, puisque le pouvoir de coupe est préservé sur une base constante pendant au moins 3 ans.
Le dernier CQC-7 qui illustre cette présentation date de 2007 et devrait rester en service pour une période indéfinie. Pour réaliser des travaux de coupe plus puissants, on peut utiliser avec profit le CQC-13 Bowie ou faire appel au CQC-15 dont la lame est hybride entre celle du CQC-7 et celle recurve du Commander. En revanche, la taille de ces modèles comparées à celle du CQC-7 fait que l'on quitte définitivement la dimension de l'EDC pour entrer dans celle du couteau tactique "lourd" dont le port sera à réserver à un environnement privé ou professionnel.
Dans l'ensemble, il s'agit d'un matériel excellent, avec une ergonomie étudiée. De prime abord, l'apport réel d'un liner en titane paraît évident, mais il convient d'être prudent, car les forums anlo-saxons font état de désengagement du liner de verrouillage sur des modèles CQC-7 et CQC-8, et j'ai fait l'expérience d'une telle mésaventure sur mon CQC-13 qui figure sur la photographie ci-dessus. Le CQC-13 possède un manche de 127 mm qui protège remarquablement la main de l'utilisateur et une lame de plus de 95 mm utilisables.
La conception générale des couteaux ne semble pas en cause et les incidents ne sont pas forcément reproductibles mais l'élasticité du titane pourrait favoriser un déplacement limité du liner lorsque l'index appui fortement sur le verrou linéaire. J'ai observé un phénomène similaire sur mon Stryker D2 Nitrous mais sans aucun désengagement du locking liner. La dernière photographie montre la différence de débattement entre les deux linerlocks du CQC-7 (en haut) et du Stryker (en bas). Je n'ai jamais eu de problème avec mes CQC-7 qui ont toujours verrouillé sec et possèdent en outre des manches particulièrement rigides.
A l'heure actuelle, j'utilise de manière alternative mon dernier CQC-7 et un Stryker D2 Nitrous. A peu de chose près les deux outils fournissent des prestations similaires mais ma préférence d'utilisateur et de collectionneur donne un bonus ergonomie/puissance de coupe aux couteaux Emerson.
Je vais prochainement tester une version à finition satin du CQC-8 à titre privé, une version du CQC-10 et un A-100 mais j'attendrai d'avoir un retour d'expérience suffisant pour me prononcer sur le fond.
Ils ont lu aussi :
Mots-clés : Couteaux Emerson
Derniers commentaires
→ plus de commentaires