Couteau CRKT Terzuola BT 70
Le 70ème anniversaire de Bob Terzuola
Bob Terzuola est considéré à juste titre comme le père de tous les couteaux tactiques modernes, même si au départ son activité professionnelle était assez éloignée de la fabrication de couteaux. Les éléments caractéristiques qui ont été imposés par Terzuola sont au nombre de trois.
Le premier est l’utilisation d’une version modifié du Liner Lock moderne emprunté à son ami personnel Michael Walker.
Le second est l’ouverture ambidextre par thumbdisk, un style qui est particulièrement reconnaissable et dont l’utilisation a été portée à son pinacle par Ernest Emerson dans le domaine du couteau tactique industriel.
La troisième caractéristique est l’utilisation du G-10 pour la fabrication des côtes du couteau.
En fait, ces trois caractéristiques ont fait fortune et sont devenues quasiment un élément de base pour un très grand nombre de couteaux actuels, tactiques ou non d’ailleurs. Personnellement je suis particulièrement sensible au choix de CRKT, qui me paraît être une très bonne idée : on retrouve Terzuola sur l’un des designs de la fin des années 1970/début des années1980, avec une lame à double émouture et pointe tanto. Pour moi c’est un collector, qui tout comme le GSD est très au-dessus des autres designs de CRKT. Ce couteau a fait un tabac aux Etats-Unis, et vient seulement de commencer à arriver en France au moment où je rédige ces lignes : j’ai acquis mon exemplaire plutôt en payant sans doute un peu plus cher fin juillet 2015 à un site Internet européen bien connu et fort bien pourvu en matériel de toute sorte.
La configuration qui a été retenue par Terzuola lui-même est un couteau de grande dimension, construit pour être virtuellement indestructible dans le cadre d’un usage raisonnable d’un couteau tactique. Le couteau mesure 13 cm fermé pour 23,3 cm lame déployée. Sa masse est considérable puisqu’elle atteint les 200 grammes…
L’architecture est typique des couteaux customs fabriqués par Terzuola, c’est à-dire que l’on retrouve deux platines an acier inoxydable d’une épaisseur identique de 2 mm. La platine de droite à bien fait l’objet d’une découpe interne : avec une première découpe circulaire (en fait une forme ovoïde qui fait fortement penser à une poire) vers l’avant du couteau, suivie d’une seconde découpe rectangulaire au centre de la platine.
La platine qui sert de verrou linéaire à débattement latéral est très puissante dans son action de blocage de l’énorme lame : le dispositif étant complété par un usinage légèrement convexe qui renforce considérablement la capacité de blocage du Liner Lock sur le talon de la lame qui est lui usiné légèrement concave pour disposer d’un appui mécanique optimal.
Le blocage de la lame est parfait, car on ne constate aucun jeu résiduel vertical ou latéral, des tentatives modérées de flexion à la pointe de la lame montrent une absence totale de jeu.
Les côtes sont en G-10 noir poncé qui possède à peu près la texture du bois, leur épaisseur est comprise en permanence entre 3 et 4 mm, autant dire que les côtes contribuent assez largement à vous remplir les mains. L’épaisseur du manche est de 16 à 17 mm pour une hauteur à peu près constante de 25 mm. La prise en main est parfaite malgré l’aspect rectiligne de ce fermant tactique « vintage ». En fait le dessous du manche est beaucoup moins rectiligne qu’il n’y paraît de prime abord avec des découpes ayant la forme de vagues atténuées. En revanche, on note l’absence de quillon inférieur, sans être obligatoire je pense qu’un tel dispositif est très raisonnable sur un couteau tactique que l’on peut être amené à empoigner avec force pour des travaux de coupe un peu rudes. Toutefois, la surface considérable du manche permet une prise en main très puissante : j’ai à plusieurs reprise fait impacter la pointe dans des cartons contenant de vieilles revues, le choc a été rude mais à aucun moment la sécurité de ma prise en main n’a été compromise.
Il est important de noter que la finition des plaquettes en G-10 est superbe, avec des états de surface parfaits et un détourage très propres des côtes, sur le côté droit on trouve gravé en relief dans le G-10 la tête de dragon qui est le symbole retenu par Bob Terzuola pour lui servir de monogramme commercial.
La rigidité structurelle du couteau est renforcée par une épaisse entretoise en métal, on peut penser que le G-10 aurait peut-être permis de gagner quelques grammes… Toutefois, là aussi d’après les commentaires en ligne de Bob Terzuola sur le BT-70 il semble bien que le choix d’une entretoise métallique soit un choix personnel et non un choix commercial imposé par CRKT.
La visserie torx utilisée sur le manche est de diamètre moyen, l’axe du pivot de la lame est parfaitement adapté à la puissante lame, et le stop pin est massif. On peut regretter que le talon de la lame n’ait pas été usiné en creux au niveau du contact avec le stop pin on aurait alors disposé d’une architecture mécanique parfaite. Mais bon, le BT-70 est déjà extrêmement solide.
Le clip est à une seule position Tip Up, ce qui est regrettable sur un couteau ambidextre. Je me suis amusé à porter ce couteau comme EDC pendant mes vacances et je dois dire que la rétention assurée est parfaite. Cela étant dit, les lois de la gravité avaient tendance à tirer mon bermuda un peu en direction du sol…Par contre avec une bonne ceinture et un tissu assez épais pas de souci, ce couteau lourd et massif se fait parfaitement oublié en poche.
Une autre remarque doit être mentionnée, le couteau est pourvu de rondelles en téflon pour assurer le déploiement fluide de la lame, et ce déploiement était très fluide lors de la réception du couteau, pour s’altérer jusqu’à un quasi blocage en position fermée. Ce phénomène a sans doute été dû à une période de chaleur caniculaire qui a dépassé les 38°C pour retomber seulement à 32° le soir après 21 heures 30. Une fois la chaleur passé le couteau a retrouvé toute sa fluidité. Sur la même période je disposais d’un Terzuola Fox-515 doté de rondelles en bronze phosphoré qui n’a pas été impacté par la température…
La lame est réalisée en AUS-8, ce qui est à mon avis largement insuffisant pour un design de Bob Terzuola, dotant plus que le prix de vente conséquent laisse envisager la possibilité d’un usage d’un acier comme le 154 CM qui eut été plus cohérent sur un tel couteau, car fortement utilisé par Robert Terzuola dans les années 1980…Elle possède une dureté de 57/59 HRC sur l’échelle de Rockwell, ce qui est habituel pour de l’AUS-8.
La lame possède une épaisseur de 4 mm remarquablement bien gérée en mode dégressif, et cela dotant mieux que la présence d’une double émouture permet effectivement de disposer d’une très bonne capacité de coupe. Ce couteau n’est pas fait pour passer le test de la feuille de papier mais en revanche il fait merveille sur les emballages les plus renforcés, au-delà de ce que j’attendais pour de l’AUS-8. On remarque toutefois que le tranchant du biseau de la pointe tanto est très coupant, ce qui n’est pas forcément le cas sur tous les couteaux, et même avec de biens meilleurs aciers.
La lame mesure 105 mm de la pointe à l’avant de la rampe crantée usinée sur le dessus, avec un tranchant utile de 100 mm. Donc vraiment un 4 pouces. La lame est haute de 25 mm d’une manière constante jusqu’à la pointe, ou une sorte de faux-contrant assure la transition vers le biseau, ce qui donne la curieuse impression d’avoir un croisement entre un Clip Point et un American Tanto, en tout cas cela est très réussi et j’y suis personnellement très sensible. La lame comporte deux gouttières latérales, destinées à alléger le poids de la lame, mais les mythos y verront sans doute une rémanence des fameuses gouttières anti-succion !!!
La lame possède un traitement de surface de type Stonewashed parfaitement homogène et qui a très bien résisté à l’abrasion jusqu’à présent. La partie avant de la lame, sur environ 5,5 cm à partir de la pointe, reçoit une émouture plate très bien exécutée, qui donne un tranchant durable et assez fin malgré l’épaisseur de la lame. La seconde partie de la lame jusqu’au ricasso reçoit une émouture en creux qui donne un tranchant plus puissant selon Bob Terzuola. On note que cette double émouture est utilisée par Terzuola sur un certain nombre de couteaux customs très impressionnant, c’est-à-dire possédant le même gabarit que le BT-70. Le dos de la lame est plat à l’exception notable d’une courte rampe crantée de 10 mm et du faux contre-tranchant mentionné supra : le pouce y trouve un très bon appui sans être trop abrasif.
Vous l’aurez sans doute deviné, mais pour une raison forcément un peu irrationnelle, j’aime beaucoup ce gros et lourd couteau, sans doute parce qu’il est politiquement incorrect dans un monde devenu de plus en plus aseptisé. Et puis franchement, pour un amateur de couteau tactique, le modèle commémorant le 70ème anniversaire de Robert Terzuola est sans nul doute un must. Il n’en demeure pas moins vrai que CRKT devra faire attention aux aciers utilisés pour les lames, à une époque où Böker Plus généralise l’usage du VG-10 pour un exceptionnel rapport qualité prix. Le couteau BT-70 est d’ailleurs de nouveau en rupture de stock chez le fabricant, c’est quand même une assez bonne indication sur le plan de l’intérêt que lui porte les amateurs de couteaux aux Etats-Unis.
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Mots-clés : Couteaux CRKT
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