Couteau Real Steel Blue Stinger
Une custom collaboration de Rick Lala
Si CRKT a produit avec succès plusieurs couteaux de Flavio Ikoma, les travaux de Rick Lala restent assez largement inconnus du public français. J’ai souvenir que Tuan a dû évoquer les travaux de ce coutelier dans un numéro déjà ancien de LPDC. Le couteau présenté est un design classique de Rick Lala, le Blue Stinger (qui existe aussi au demeurant en couleur jaune : pour des raisons personnelles je préfère le bleu, même si un manche en titane anodisé or possède un petit grain de fantaisie qui ne me fait pas peur).
Assez curieusement on aurait pu penser que le design de Rick Lala aurait été présenté dans le cadre d’une custom collaboration avec Spyderco ou Benchmade, alors que curieusement c’est une compagnie chinoise récente Real Steel qui nous offre un travail de premier ordre. Cette compagnie créée à Hangzhou sur la côte Est de la Chine en 2013 poursuit des travaux de fabrication qui sont uniquement dédiés à l’exportation, dans la mesure où la fabrication est constituée de fermants dotés de système de verrouillage, et que la législation chinoise interdit la vente de tels couteaux. D’après les données publiées sur le site de Real Steel, Real Steel possède une expérience de plus de 15 ans dans la fabrication de couteaux de haute-qualité. Real Steel possède deux designers chinois attitrés qui conçoivent à la fois les couteaux d’entrée de gamme (remarquables et qui feront l’objet d’une revue dédiée).
L’utilisation quasi systématique d’acier Sandvick 14C28N pour les couteaux d’entrée de gamme laisse penser que Real Steel pourrait avoir été un sous-traitant de Kershaw mais sans plus de certitude que cela… Le couteau étudié appartient à la gamme S qui est celle des couteaux fabriqués à la main et des éditions limitées (il n’y a pas tromperie en la matière, clairement). A l’heure actuelle la marque Real Steel possède un seul importateur français qui est la Coutellerie Tourangelle, mais je pense sincèrement que si Real Steel reste sur sa trajectoire actuelle elle a vraiment de l’avenir !!!!
Mécaniquement le couteau est un système du type Reeve Integral Lock (RIL), sans aucun ajout technologique autre : Lock bar Stabilizer, insert anti-usure en acier trempé à l’interface du verrou et du talon de la lame : disons que le modèle fabriqué par Real Steel est la réplique exacte du couteau custom éponyme.
Le Blue Steel est long de 10,90 cm en position fermée pour 19,50 cm en position ouverte, ce qui le classe dans les couteaux de taille moyenne apte au concept EDC, sans compter que sa masse est de l’ordre de 109 grammes. C’est donc un couteau qui n’a absolument rien d’agressif.
Les deux côtes en titane sont réalisées en titane TC-4, une taxinomie chinoise pas forcément facile à transposer. Toutefois, si l’on se base sur la composition chimique donnée par des tables de production industrielle il s’agit d’un alliage TI-6Al-4V, c’est-à-dire qu’il s’agit du 6Al4V bien connu en coutellerie, du classique et du robuste si le traitement thermique est bon, puisque c’est le même alliage américain qui est utilisé avec succès sur les Sebenza Large 21 et 25.
Les côtes possèdent une épaisseur de 3 mm. Le verrouillage est rapide et puissant dès éjection de la lame avec un claquement bien net : après contrôle il n’existe aucun jeu résiduel vertical ou latéral et une flexion modérée sur la pointe montre la robustesse de l’ensemble. L’engagement du frame est de l’ordre d’un gros tiers : cet engagement est régulier cycle après cycle et la prise en main n’entraîne aucun Edéplacement supplémentaire du frame. Le retrait du verrou demande un peu de force, mais qui rien soit anormal. En dépit d’une seule découpe faisant office de ressort, la platine est extrêmement puissante. Son désengagement est facile en s’aidant du doigt sur la partie évidée du frame.
Bien qu’il n’y ait pas de Lock Bar Stabilizer on note que le clip est monté à une seule position et appui assez fortement sur la platine, ce qui correspond mécaniquement à la fonction du mécanisme inventé par Rick Hinderer : cette disposition assez simple est reprise par de nombreuses marques de couteaux y compris des couteaux européens et américains.
La côte de gauche reçoit un insert en fibre de carbone du plus bel effet, mais cette incrustation réalisée dans un évidement de la côte n’apporte aucun bénéfice en terme de grip : c’est dommage au demeurant, mais en testant différentes configurations à base de fibres de carbone pour les côtes seuls quelques modèles avec des fibres tressées larges apportent un peu de grip, c’est notamment le cas du Spyderco Gayle Bradley version 1, dont une version 2 allégée est prévue par Spyderco pour l’année 2016. Pour le reste le G-10 me paraît très supérieur pour un couteau tactique. En revanche, pour un couteau de type EDC le gain de poids obtenu par des côtes en fibres de carbone emporte toute mon adhésion au regard de mon expérience personnelle.
Le manche est épais de 10,5/11 mm pour une hauteur de 25 mm au centre du manche, avec un maximum de 28 mm au niveau des découpes avant des côtes constituant un quillon inférieur et 20 mm en décroissance à l’extrémité du manche. Contrairement à ce l’on pourrait penser l’ergonomie est le point fort de ce couteau qui vient littéralement se verrouiller dans la main. La courbure du manche y est bien sûr pour beaucoup : on dispose d’une prise en main incroyablement puissante. Cette sensation est complétée par le crantage supérieurement efficace présent sur l’entretoise en titane. On note que ce crantage est très propre sur le plan de l’usinage qui est de type CNC.
Le dos, le dessous et toutes les parties en creux des côtes en titane reçoivent une anodisation d’un bleu profond absolument uniforme et qui vient s’accorder à merveille avec l’insert en fibre de carbone laminée noire : c’est classieux, et comme d’habitude je l’ai testé en termes d’apparence auprès de collègues, pas vraiment collectionneur de couteau, et ceux-ci ont été très favorablement impressionnés : le couteau est perçu comme un bel objet absolument pas menaçant ou inquiétant. Il faut dire que les flancs des côtes en titane possèdent une finition satinée qui créée un contraste de couleur proche de la perfection avec le bleu sombre (à ne pas confondre avec un bleu céruléen). J’insiste sur la fait que la visserie Torx utilisé sur ce couteau est de très grande qualité, qualité qui n’a été possible selon Real Steel qu’en les produisant de manière spécifique, donc rien à voir avec les vis cheap d’une production low cost chinoise (ou américaines d’ailleurs, notamment sur le Link…).
Le clip est réalisée en titane, et il est très dur à mon goût et même trop dur pour être utilisé sur un Jean’s de marque, car il marque très fort son emplacement sur le rebord de la poche du pantalon. En hiver, c’est moins grave en ce qui me concerne, puisque je place mon EDC dans une poche intérieur de ma veste de costume. Le couteau se fait complètement oublié sauf lorsque l’on a besoin de lui.
La lame en acier CPM-S35VN possède une géométrie Drop Point assez classique, qui reçoit un peu de tension par adjonction d’un faux contre-tranchant. La lame mesure 84/85 mm de la pointe au ricasso avec une surface coupante lisse utile de 80/81 mm : un excellent ratio qui conserve une capacité très polyvalente à ce couteau. La lame possède une finition satinée très propre avec deux inscriptions au laser : du côté gauche la marque Real Steele et du côté droit le logo de Rick Lala avec la fameuse enclume traversée par une épée…
Le tranchant redoutable est obtenu par une émouture en creux parfaitement usinée, le tranchant possède une qualité identique à ceux des meilleures réalisations couteaux ZT produits en 2015. La lame reçoit une rampe crantée de 8/9 mm sur laquelle le pouce trouve un appui très solide. On note que la lame possède une encoche fortement usinée en creux aux niveaux de son interface avec le stop pin, il s’agit d’une accentuation de la technique retenue par Chris Reeve sur ses couteaux : cet appui respire la solidité et offre probablement un calage mécanique très difficile à améliorer.
Le flipper est plutôt court, avec une surface d’appui bien crantée. L’ouverture de la lame est un modèle du genre : la lame possède une détente très puissante, ce qui provient d’une bille de rétention particulièrement puissante, il est impossible d’ouvrir la lame en secouant le couteau. Le système est de type Ball-Bearing, on pense bien sûr à l’utilisation d’un système Korth IKBS, mais il semblerait que Real Steel possède une technologie analogue dont la firme est propriétaire.
Le CPM-S35VN a été développé en 2009 par Crucible en collaboration avec Chris Reeve tout comme son prédécesseur le CMP-S30V. Les données techniques publiées montrent que le S35VN possède la composition suivante : 1,40% de carbone, 14% de chrome, 3% de vanadium, 0,5% de niobium et 2% de molybdène. Cet acier possède donc des carbures de vanadium, de niobium et de chrome. L'adjonction de niobium permet selon Crucible d'obtenir une résistance accrue de 15 à 20% par rapport au S30V concernant les chocs (sollicitations mécaniques transverses). En revanche, les capacités de coupe des deux aciers données par l'indice CATRA sont identiques avec un indice de 145 (la base 100 est donnée par le 440 C, le test est une opération mécanique de coupe de cartons enduits de silice, dans ce test scientifique le 154 CM obtient seulement un indice de 125!!). Toujours selon Crucible pour des applications de coutellerie, le traitement thermique recommandé doit procurer une dureté comprise entre 58-61 HRC.
Le couteau Real Steel Blue Stinger est réellement une réalisation exceptionnelle que les amateurs de couteaux américains comparent à une réalisation custom, alors qu’il y a seulement quelques années les réalisations de l’Empire du Milieu étaient vouées aux gémonies sur les forums… Je trouve ce couteau très intéressant, avec une lame supérieurement efficace et un niveau de finition exceptionnel, sans compter un rapport qualité/prix tout à fait correct compte tenu des matériaux utilisés.
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